Rapport sur le Monitoring des Violations des Droits des prisonniers.


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Période du mois de mars 2020.

Plan du présent rapport.

INTRODUCTION.
TRAITEMENTS INHUMAINS ET DEGRADANTS.
PRIVATION DES SOINS DE SANTE.
AUTRES VIOLATIONS
CONCLUSION.
RECOMMANDATIONS.

  • INTRODUCTION

Comme il est dans les missions qu’elle s’est assignée, ACAT BURUNDI a documenté des cas des violations des droits des personnes privées de liberté détenues dans les établissements pénitentiaires en MAIRIE DE BUJUMBURA (prison de Mpimba) et dans les provinces de MURAMVYA, GITEGA et RUMONGE au cours du mois de mars 2020.
Les violations observées dans ces différentes maisons d’arrêts sont notamment des cas de traitements inhumains et dégradants constitutifs d’actes de torture, la privation des soins de santé, détentions arbitraires et autres violations relatives à l’insalubrité due à la surpopulation carcérale.
Des détenus affiliés au parti présidentiel, le CNDD-FDD déguisés en membres du « comité de sécurité » qui sont en grande partie complices avec l’administration pénitentiaire et la police pénitentiaire sont pointés du doigt comme étant des auteurs présumés de ces violations.

 CAS DE TRAITEMENTS INHUMAINS ET DEGRADANTS.

Au cours de ce mois de mars 2020, le phénomène récurrent de maltraitance physique des prisonniers politiques s’est fait toujours remarquer particulièrement dans les prisons de Mpimba et Rumonge au moment où une accalmie relative se manifeste dans les autres maisons d’arrêts concernées par le présent rapport.

Comme annoncé ci-dessus, les auteurs de ces violations restent toujours les détenus fidèles du parti au pouvoir, le CNDD-FDD qui se déguise dans ce qu’ils ont dénommé membres du « comité de sécurité » et qui opèrent toujours en complicité avec la police et les autorités pénitentiaires.

Les commanditaires de ces actes ignobles au cours du mois de mars 2020 sont les nommés : ZIGIZA, BUTUNGWA Pascal, NGENDAKUMANA J Bosco et MOUSSA. Ces derniers et leurs adeptes effectuent des fouilles perquisitions, arrêtent leurs pairs et leur infligent des sanctions comme l’isolement dans des endroits insalubres et inadéquats (cachots ou chambre correctionnelle) ou la contrainte de passer une nuit blanche à la belle étoile tout en étant soumis à de sévices corporels comme les bastonnades.

A titre d’illustration, ci – après les cas collationnés :

– En date du 05 mars 2020, à la prison centrale de MPIMBA, NTAHOMVUKIYE Pierre a été mis au cachot par une bande des Imbonerakure sous les ordres d’un certain Moussa; accusé à tort de vouloir organisé une révolte. Il a été relâché le lendemain le 06 mars.

– En date du 8 mars 2020, à la prison de RUMONGE, un détenu rwandais du nom de John BAGIRE a été attaqué dans sa chambre par des prisonniers déguisés en membres du comité de sécurité dirigé par un Imbonerakure dénommé NGENDAKUMANA J Bosco. Il a été tabassé et injurié comme quoi c’est « un chien tutsi rwandais et ennemi du pays ». Il a ensuite été amené dans une chambre correctionnelle où il y a passé une nuit avant qu’il ne soit relaxé.

– En date du 16 mars 2020, à la prison de RUMONGE, un certain NSENGIYUNVA GERVAIS a été emprisonné par les prisonniers déguisés en membres du comité chargé de sécurité. Le chef de sécurité de cette prison, un Imbonerakure dénommé J. Bosco NGENDAKUMANA a ordonné que Gervais soit mis en isolément pendant deux jours dans une chambre de correction. Ceci parce qu’il a été fouillé et on a trouvé dans sa poche une somme de 5000 FBu. Ils ont tenté de lui confisquer cet argent mais ce dernier a résisté. Après une longue dispute et sur ordre de Jean Bosco NGENDAKUMANA, Gervais NSENGIYUNVA a été accusé de se révolter contre l’administration de cette prison.

– En date du 19 mars 2020, à la prison centrale de Mpimba, un groupe de prisonniers dirigé par un certain ZIGIZA ont encore une fois isolé abusivement un certain Dieudonné GAHUNGU l’accusant d’avoir reçu une somme d’argent en provenance de la Belgique avec lequel il acheté seul la bière sans partager avec les autres. Pour aggraver sa situation, on l’a accusé d’injurier l’administration pénitentiaire. Il a passé deux jours d’emprisonnement et il a été relaxé le samedi 21 mars 2020.

– En date du 25 mars 2020 à la prison de Rumonge, le chargé de sécurité à la prison, un certain Jean Bosco NGENDAKUMANA a isolé KUBWAYO Sam dans une chambre de correction pendant deux jours prétextant qu’il se révolte contre des lois appliquées par ledit comité de sécurité. Tout a commencé lorsque Kubwayo Sam a reçu une visite d’un codétenu dans sa cellule. Ils l’ont accusé de tenir une réunion de mettre à feu la prison.

– En date du 26 mars 2020, le chargé de sécurité à la prison de MPIMBA, un certain BUTUNGWA Pascal a ordonné l’isolement d’un certain NDIKUMWENAYO Jean. Ce dernier est accusé à la fois de ne pas respecter les ordres du chargé de sécurité et de se révolter contre le pouvoir raison pour laquelle il est cité parmi les ennemis du pays.

– En date du 26 mars 2020, la directrice de la prison de Gitega a appelé tous les prisonniers qui avaient des cheveux même ceux qui ont des dreads pour se faire raser sans aucun autre motif. Ceux qui n’ont pas obtempéré ont été menottés par force. Un certain NTWARI Willy Rachid a protesté en évoquant leur droit le plus absolu de porter des cheveux. Mais il en a payé le prix car il a été conduit manu militari dans une chambre correctionnelle où il a passé trois jours. Tous les prisonniers ont fustigé le comportement que la directrice de cette maison d’arrêt a manifesté envers ces prisonniers.

 CAS DE PRIVATION AUX SOINS DE SANTE

Le droit à la santé est un droit reconnu à tout citoyen burundais y compris les personnes privées de liberté comme c’est d’ailleurs prévu par les textes nationaux et internationaux de protection des droits de l’Homme et ceux relatifs aux droits reconnus aux personnes en privation de liberté.
Malheureusement, certaines autorités pénitentiaires piétinent ces textes en refusant ce droit à certains détenus surtout ceux qui sont poursuivis pour des crimes à caractères politiques.

Au cours du mois de mars, ACAT – Burundi a pu s’enquérir de cette situation où les détenus se sont vus refuser l’accès aux soins de santé dans une structure de santé appropriée alors que la nature des soins dont ils ont besoin ne sont pas assurés par le dispensaire de la Prison.

Cette forme de maltraitance s’est manifestée dans les prisons de Gitega, Muramvya et Mpimba. Les victimes sont : NKURUNZIZA Jean Berchmans (Gitega), DOMBORI Pascal (Gitega), TUYISENGE Winnie Fride (Gitega), Général Major NDAYISABA Célestin (MURAMVYA), Major NDIKUMWENAYO Vital (Mpimba).

Les principaux auteurs de ces violations sont les responsables des établissements pénitentiaires sauf pour le cas du Général Major NDAYISABA Célestin. Pour lui, l’ordre de refus vient du Procureur Général de la République Sylvestre NYANDWI.

 AUTRES VIOLATIONS

Alors que la pandémie de CODIV 19 ravage le monde, les maisons d’arrêts ne sont pas épargnées malgré les mesures prises par la Direction Générale des Affaires Pénitentiaires interdisant les visites. Les prisonniers vivent dans des conditions d’extrêmes précarités dues au surnombre et au manque de matériel (eau potable et savons) pour le lavage des mains. Ces détenus indiquent que les moyens à leur disposition ne sont pas suffisants pour se protéger de cette pandémie de coronavirus. Ils demandent d’être bien sensibilisés sur cette pandémie car les détenus ignorent encore les mesures de prévention de cette maladie.
Rappelons que dans toutes les maisons d’arrêts citées-ci haut, il s’observe encore un effectif très élevé de détenus dépassant la
capacité d’accueil des prisons si l’on se réfère au nombre de détenus
qu’elles devraient accueillir et le nombre de prisonniers qu’elles
comptent actuellement.
Le tableau ci-dessous illustre cette situation :

Maison d’arret Capacité d’accueil Nombre total de prisonniers Nombre de prévenus Nombre de condamnés Dépassement en pourcentage
MURAMVYA 100 864 504 360 864%
MPIMBA 800 4393 2291 2102 449%
GITEGA 400 1284 666 618 221%
RUMONGE 800 1075 306 769 134.365%

Maison d’arrêt Capacité d’accueil Nombre total de prisonniers
Nombre de Prévenus Nombre de condamnés
Dépassement en Pourcentage

MURAMVYA 100 864 504 360 864%

MPIMBA 800 4393 2291 2102 449%
GITEGA 400 1284 666 618 221 %
RUMONGE 800 1075 306 769 134.375%

• CONCLUSION

Le contexte politique actuel au Burundi est propice à la récurrence des violations des droits de l’homme et l’impunité ; la population carcérale en souffre particulièrement. les détenus poursuivis pour des crimes à caractère politique continuent d’être la cible privilégiée des imbonerakure (miliciens du parti présidentiel) qui sont à l’intérieur des prisons pour une mission bien précise à savoir surveiller et infliger des traitements inhumains et dégradants à des opposants politique ou supposé comme tel, détenus illégalement.

Les responsables des établissements pénitentiaires semblent jouer la carte de la complicité en assistant en spectateurs indifférents aux nombreux mauvais traitements infligés aux personnes détenues opérées par les jeunes imbonerakure qui se cachent derrière le « comité de sécurité » en violation de la loi et du règlement qui régissent les établissements pénitentiaires au Burundi.

Au regard de cette situation, les autorités burundaises doivent prendre conscience de la gravité de la situation et fournir un effort pour mettre fin aux récurrentes violations des droits humains dans le milieu carcéral.

• RECOMMANDATIONS

A l’endroit du gouvernement du Burundi :

 D’arrêter et de traduire en justice les auteurs des violations des droits de l’homme en général et ceux des détenus en particulier ;
 D’améliorer les conditions carcérales en prenant des mesures de désengorgement des prisons et de traiter sur le même pied d’égalité tous les prisonniers,
 De sensibiliser les détenus et garantir les conditions propices pour la prévention de la pandémie due au CORONA VIRUS
 De respecter les droits reconnus par les textes nationaux et internationaux aux détenus et surtout le droit à la santé qui est souvent violé, provoquant ainsi l’irréparable.

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